dimanche 29 mars 2020



                                                                   Conférence Camus
  A l’origine : conférence sur  Sartre, Camus, Aron
  J’espère que la conférence sera autre chose qu’un réservoir de citations pour les hommes politiques puisque tous les candidats aux dernières élections présidentielles n’ont pas manqué de le citer !  

Intro
 Camus Gallimard
Le 4 janvier 1960, Albert Camus est décédé  dans un accident de voiture à Pont sur Yonne, commune  proche de Sens dans l’Yonne.
                       Michel Gallimard, conducteur de la voiture,  décède 5 jours plus tard.  Janine Gallimard,  sa femme, et Anne Gallimard, sa fille,  sont blessées.
Quelles ont été les causes de  de l’accident ?
 Vitesse excessive ?  Faute du conducteur ?   Route glissante ? Crevaison ? blocage roue (  =  Facel Véga=cercueil roulant ?), coup du KGB ?
     Dans la serviette de Camus, on trouve le  manuscrit  du «  Premier homme »,  une édition scolaire d’« Othello » de Shakespeare,  « Le gai savoir » de Nietzsche et  le billet du train  qu’il aurait dû prendre.

Camus était âgé de 47 ans.   Il aurait eu 87 ans en l’an 2000.
                   A cet âge,  Montaigne n’avait  pas écrit le  livre III des Essais , Marc Aurèle, Les Pensées,  Hobbes, le Léviathan , Voltaire n’a publié que les Lettres anglaises, Rousseau  n’avait  pas écrit le  Contrat Social ni  les Confessions,  Montesquieu, l’Esprit des lois, Marx, le Capital,  Levi-Strauss ,Tristes Tropiques….
    Camus était :
        Romancier( l’Etranger, la Peste,  la Chute , le Premier homme),  essayiste (Mythe de Sisyphe, l’Homme révolté ),  prosateur (l’Envers et l’Endroit , Noces , l’été ,carnets ),  dramaturge,  ( Etat de siège , Caligula, les Justes+  nombreuses adaptations )
  Critique littéraire), éditorialiste, journaliste ( Alger républicain , Combat, l’ Express)
        Metteur en scène / orateur / conférencier  / épistolier/préfacier/ directeur de collection chez Gallimard
Militant   (pétitions, discours, interventions)
Prix Nobel de littérature  en 1957

Plan
1 formation
           11 Famille
           12 L’école et le lycée
           13 Jeunesse
131 Les amitiés
132 Les amours
133 Les  études
134 La  culture

135 L’écriture
136 Le  théâtre
137 le journalisme 

138 La politique
2 Guerre, occupation, résistance
            21 Occupation
            22 Résistance
            23 Libération : Combat
             24 L’épuration
             25 St Germain des près
3         Le communisme  
           31 Critique du marxisme-léninisme
           32 Critique de l’URSS             
          33 L’homme révolté

4 La guerre d’Algérie
  41 L’appel à la trêve civile
42 Contre l’indépendance
 43 Le découragement
5 Le Prix Nobel
Conclusion : La revanche

Camus
1 La formation

Elle est évidemment décisive pour expliquer ces choix politiques arrivé à l’âge adulte.

11 la famille

Né en 1913 à  Mondovi en Algérie
Famille paternelle  en Algérie  depuis  les années 1830

Il se sent algérien
  « Etant africain et non pas européen… »          

« Méditerranéen » 
Espagne est sa seconde patrie :   soutien aux républicains et aux anarchistes 
       Fascination  la Grèce antique            
                 «  Gréco-latin,  rescapé du paganisme antique »
                 « païen isolé dans le christianisme » 
          « Je me sens plus près des valeurs du monde antique que des chrétiennes »
« Si pour dépasser le nihilisme, il faut revenir au christianisme, on peut bien suivre le mouvement et dépasser le christianisme dans l’hellénisme »
    Réticence / Rome : « Du génie, les romains n’ont eu que ce que nous appelons ainsi dans nos armées »
Fascination pour l’Italie  de la Renaissance

Achètera un maison à Lourmarin  dans le Vaucluse.

Méditerranée sans  islam : religion  normative, obscurantiste, réactionnaire ( ce que pensaient tous les intellectuels français de l’époque.)
                                                        
·         Père : Lucien, décédé  à la guerre en septembre 1914

2 témoignages sur son père :

         peine de mort : il avait assisté à une exécution capitale et en revint bouleversé.
          La lutte contre la peine de mort sera un  engagement permanent de Camus : « Réflexions sur la guillotine » avec Arthur Koestler

        expérience zouave au Maroc   1905
                               camarades tués, décapités,  le sexe dans la bouche  
                             « Un homme,  ça  s’empêche » 
« La liberté sans limite, c’est le contraire de la liberté. La liberté sans limites, seuls les tyrans peuvent l’exercer. Une liberté qui ne comporterait que des droits ne serait pas une liberté » 
                             «  l’intransigeance exténuante de la mesure »


·         Mère : Catherine, d’origine espagnole, de Minorque  

      Sourde,  silencieuse (méningite ?)
 « Quand ma mère avait les yeux détournés de moi, je n’ai jamais pu la regarder sans avoir les larmes aux yeux. »  
dédicace du  « Premier homme » : « A toi, qui ne pourra jamais lire ce livre »

Nobel « Dans ce moment où l’excès d’honneur qu’on me faisait m’embarrassait, je m’aidais d’une pensée qui a toujours été mon réconfort. Je me retournais vers Alger. Là- bas se trouve ce que j’aime le plus au monde et j’ai attendu, pour savoir ce que je devais penser de ce qui m’arrivait, de savoir que ma mère en était heureuse »


Enfant
·         Grand-mère violente qui le bat à coups de nerfs de bœuf

Pauvreté matérielle

Pauvreté culturelle
« personne autour de moi ne savait lire » 
   pas de livres

Du coté des dominés

Equipe foot
Passionné de foot :    « Le peu de morale que j’ai appris c’est sur un terrain de foot et sur les planches »

« J’appris de suite qu’une balle ne vous arrivait jamais du côté où l’on croyait. Ca m’a servi dans l’existence et surtout dans la métropole où on n’est pas franc du collier »

 17 ans  Tuberculeux  : impossibilité éducation nationale / armée/condamné à la  lecture/  

·         Oncle Gustave Acault :   boucher,  franc maçon,  voltairien : Balzac, Zola, France, Gide, Valéry Maurras
« C’était le seul homme qui m’ai fait imaginer un peu ce que pouvait être un père »

12  Ecole  et Lycée  

·         M Germain    
lecture Dorgelès
pousse à passer le concours des bourses
Dédicace du prix Nobel
« Ma première pensée après ma mère a été pour vous. Sans vous, sans cette main affectueuse que vous avez tendu au petit enfant que j’étais, rien de tout cela ne serait arrivé »

1945 « Je voudrais que tu m’assures que je ne me suis pas trompé en t’orientant vers le lycée. »

·         Jean Grenier
Professeur de philosophie
« Essai sur l’esprit d’orthodoxie »
« Rencontrer cet homme aura été un grand bonheur. Le suivre aurait été mauvais, ne jamais l’abandonner sera un bien »
    Pétainiste, antisémite, Algérie française
     13 la jeunesse
131 Les amitiés
Importance de l’amitié
-          Amis d’enfance et d’adolescence
-          Louis Guilloux / Francis Ponge/ Roger  Martin du Gard

-          Emmanuel  Roblès/ Jules Roy /Jean Daniel
Mouloud Ferraoun
-          Sartre /  Pascal Pia avec qui, il se fâchera
-          lien  d’amour : Jean Daniel Jules Roy
-          pas affidés (contrairement à Sartre)
 « joyeux drille »

-          René Char

132 Les amours d’Albert 
                   1934  21 ans mariage  Simone Hié  enlevée à  Max-Pol Fouchet
                    Morphinomane, infidèle  
                  1936 découverte de  son infidélité  
1940 divorce/  l’aidera jusqu’à sa mort
  Christiane, Yvonne, Lucette,
Francine   mathématicienne et pianiste qu’il épouse en 1940
Francine : mère, deux sœurs « je ne savais pas que j’avais épousé quatre femmes »
                       Pas séducteur mais séduisant
                         Fasciné par  Don Juan
-          liaisons : Patricia Blake, Mamaine Koestler,    Maria (Casares) ,  Catherine (Sellers) ,   Mi=Mette Ivers  1957
-                                Problème pour sa secrétaire de  l’agenda  pour que les femmes ne se rencontrent pas

-          A Maria Casares : «  je t’ai trompé mais jamais trahi »


-          Francine malade, dépressive, tentative de suicide
-           belle famille lui reproche son mode de vie
-           Culpabilité /Francine
-          Prix Nobel : « elle a été à la peine. Il est normal qu’elle soit à l’honneur »
-          « On n’épouse pas sa sœur »

-          Père de Jean et Catherine nés en 1945
 « Je ne suis pas fait pour le mariage, mais je suis fait pour la paternité »

133 Etudes
Philosophie
Maitrise sur Plotin et St Augustin
Impossibilité de passer l’agrégation
Philosophe ?
 « Je ne suis pas philosophe. Je ne crois pas assez à la raison pour croire à un système. Ce qui m’intéresse, c’est de savoir comment il faut se conduire. Et plus précisément, comment il faut se conduire quand on ne croit ni en Dieu ni à la raison »
                « Je n’ai pas envie d’être un génie philosophique »
Nietzche
·         Nietzchéen
 « Je dois à Nietzche une grande partie de ce que je suis »

       « Nietzsche dénonce le christianisme qui a commencé de substituer à la contemplation du monde la tragédie de l’âme »

-          Attitude /christianisme

                 Pas anticlérical   / «  Vulgarité de l’irréligion »
                     Contre l’Eglise espagnole
A Grenier qui va se marier à l’église : « tant qu’à faire une connerie, autant la faire en musique »

                 «  Je suis de ceux que Pascal bouleverse et ne convertit pas »

          « Je lis souvent que je suis athée, j’entends parler de mon athéisme. Or ces mots ne disent rien, ils n’ont pas de sens pour moi. Je ne crois pas en dieu et je ne suis pas athée. » 

     Sartre  dit de lui qu’il était  « Anti-théiste »

-          Attitude / Jésus : vie humaine exemplaire, ne croit pas à la  résurrection
                          Brukberger : « il a cherché toute sa vie un corps de rechange au christianisme »
                   Père Guissard  à sa mort « Le chrétien ne se console pas de l’incroyance de Camus »

·         Il ne croyait pas à la raison  mais à la  lucidité  

« La lucidité est la raison qui constate ses limite »
Et surtout il reprenait la formule  de Nietzche
 « J’estime un philosophe dans la mesure où il peut donner un exemple »
134  Culture
 Université populaire
Maison de la culture
1937 Conférence  sur la nouvelle culture méditerranéenne

135  Ecriture
Découverte de « La douleur » d’André de Richaud   « ‘La douleur’ me fit entrevoir le monde de la création où Gide devait me faire pénétrer ».  Il lit également « Iles » de Jean Grenier.
« J’ai eu envie d’être écrivain vers 17 ans et, en même temps, j’ai su obscurément que je le serais »
1937 L’envers et l’endroit chez  Edmond Charlot à Alger
1939  Noces
Ecriture « classique ».
Il disait que le classicisme était un romantisme maîtrisé.
 Ayant sans doute travaillé beaucoup pour acquérir la langue ( à Belcourt, on parlait le patatouète) il n’aimait pas « jouer » avec  la langue comme les surréalistes . 
« oui, j’ai une patrie : la langue française »
               « Ceux qui écrivent obscurément ont bien de la chance: ils auront des commentateurs. Les autres n’auront que des lecteurs. »
 Est-ce une allusion à l’Etre et le Néant ?

136  Théâtre  
1935    Théâtre  du travail puis  Théâtre de l’équipe

Amour du théâtre 
                 Passion/ morale /bonheur
     «  Paradis des planches »
« Pourquoi je fais du théâtre ? Tout simplement parce qu’une scène de théâtre est un des lieux du monde où je suis le plus heureux »
        Ecriture
                Révolte dans les Asturies 1936
Caligula 1944
Etat de siège 1948
 Les justes 1950

Adaptations
Temps du mépris Malraux 1936
Dévotion à la croix Calderon 1953
Requiem pour une nonne Faulkner 1956
Le chevalier d’Olmedo  Lope de Vega  1957
Les Possédés  1959

Acteur :
Gringoire de Théodore de Banville (Olivier le  Daim)
article 330 Courteline
Don Juan Pouchkine
 Paquebot Tenacity   Charles Vildrac
 Frères Karamazov 
Sartre :  proposition du  rôle de Garcin  dans Huis clos  
 Il se définissait lui-même comme  un acteur entre «  Humphrey Bogart et Fernandel » 
2 jours après sa mort une lettre de Malraux lui annonce qu’il va lui donner la direction d’un théâtre

137 Le  Journalisme
1938  rédacteur en chef Alger Républicain

1939  misère en Kabylie

138   Politique
-          1935 PCA 
Conseillé par Jean Grenier  qui  en même temps avait écrit  «  Essai sur l’esprit de l’orthodoxie » ouvrage  anti-marxiste.
      « Je partais de cette maxime générale que les hommes avaient droit au bonheur, pas forcément à la vérité »
Question ? : « Pour un idéal de justice, faut-il souscrire à des bêtises ? »
               1937 exclusion (abandon ligne anticolonialiste du PCF)
                            Connaissance concrète du stalinisme
-          Soutien au Front populaire /aux  propositions  Violette en Algérie / à la République espagnole

-          Homme de gauche 
« Les questions qui provoquent ma colère : le nationalisme, le colonialisme, l’injustice sociale et l’absurdité de l’état moderne » 

-          démocrate
           Démocratie : régime le moins mauvais
           Délibération collective, dynamique du dialogue, limitation du pouvoir étatique  (presse syndicats), protection de la minorité,   institutionnalisation du vivre ensemble
             exercice social et politique de la modestie
                     « La philosophie politique ne peut tout savoir et tout régler. Il n’y a pas de vérité absolue et officielle »

-            internationaliste : « J’aime trop mon pays pour être nationaliste »
                                    « Oui j’ai une patrie : la langue française »

                   Gary Davis : élections mondiales, parlement mondial, gouvernement mondial

-          Lutte contre toutes les oppressions d’où qu’elles viennent.     
           Réponse à Gabriel Marcel qui lui reprochait d’avoir situé « Etat de siège » (1948) en Espagne et non dans les pays communistes : « vous acceptez de faire silence sur une terreur (la franquiste) pour mieux en combattre une autre (la communiste). Nous sommes quelques-uns qui ne voulons faire silence sur rien »

-          Socialiste de gauche
   sympathisant  libertaire
                            Pour le  Communalisme libertaire en Catalogne 


Compagnonnage avec les  anarchistes qui le considèreront comme l’un des leurs  
                              estime réciproque : Maurice Joyeux

                           Contre Robespierre
St Just : «  le style guillotine »
                            Pour la Commune
« 1789, 1917 sont des dates, pas des exemples » 

-             Camus Réformiste 

1951 soutien aux travaillistes anglais  et à la social-démocratie suédoise
= améliorations de la condition ouvrière

54 appel à voter Mendès-France 


-            exigeant vis à vis de la classe ouvrière 
     «  Il ne faut pas que les ouvriers de chez nous aspirent comme il arrive à la vie bourgeoise, vie de banlieue meublée à bas prix dans des grands magasins et égayée par le cinéma du dimanche après- midi ».  Il exige de la part de la classe ouvrière  une certaine  « noblesse ». Il refuse le  socialisme du ressentiment  tel que le définissait  Nietzche.

-          Anti-industrialiste
    « La civilisation industrielle en  supprimant la beauté naturelle, en la couvrant sur de longs espaces par le déchet industriel crée et suscite les besoins artificiels. Elle fait que la pauvreté ne peut plus être vécue et supportée »

-          Méfiant  par rapport aux hommes politiques

    « La politique et le sort des hommes sont formés par des hommes sans idéal et sans grandeur. Ceux qui ont une grandeur en eux ne font pas de politique »
  « Chaque fois que j’entends un discours politique, je suis effrayé de n’entendre rien qui rende un son humain. Ce sont toujours les mêmes mots qui disent les mêmes mensonges »      
     Propositions de participation  à des cabinets ministériels :   1945 1958 : refus

-          Solitaire et solidaire  

                Sartre : «  Camus, là où vous seriez le mieux c’est aux  îles  Galapagos »

« Je n’aime pas l’humanité en général. Je m’en sens solidaire d’abord, ce qui n’est pas la même chose »

De gauche  « malgré moi et malgré elle »


2 Guerre, résistance et libération

21 l’occupation

  Engagement dans l’armée  impossible  

  1940 Paris secrétaire de rédaction à   Paris Soir  
                  Clermont- Ferrand Bordeaux Lyon  
               1941 Oran
Mai 42 : publication de « L’Etranger »  à Paris,  chez Gallimard, grâce à Malraux.

               Sartre : «  un court roman de moraliste, très proche au fond d’un conte de Voltaire »
 Camus : «  Je sais que la plupart de ses critiques sont justes mais pourquoi ce ton acide ? »

octobre 42 : « Mythe de Sisyphe » Gallimard
                        Passage sur Kafka supprimé à la demande de la censure allemande.

Aout 42  Chambon sur Lignon

 Juin 43 rencontre Sartre

 Sartre/Camus  1 2

= Racine /Corneille =  Voltaire/Rousseau = Beatles /Rolling Stones


·         différences
Entre 43- 46  ils échangent la « rhubarbe et le  séné »
   mais rivaux  sur les mêmes plates- bandes : romans, théâtre, essais … femmes

Sartre /Camus

-          famille  bourgeoise, nanti/pauvre ( château/chaumière)   
               cf Prix Nobel
-  Livres  / famille illettrée  
- Héritier/assoifé
- études Normale sup, agreg/ autodidacte
-  macadam, bistrots /nature, « le ciel du Havre n’est pas celui d’Alger »
- boxeur/gardien de but
-          caractère
                   Sartre  sûr de lui : Spinoza et Stendhal
                    Camus :      Peu de confiance en lui, travaillé par le doute (« je suis sec »)
                                      Pensée du suicide (Carnets)
-          politisation années 30
Sartre : désengagé

  Sartre : 1933  Allemagne « J’ai passé une année formidable  je n’ai pas compris la signification du défilé des nazis au pas de l’oie mais la plupart des berlinois que je connaissais les prenaient à la rigolade comme moi »
                                       (Différence avec Aron)

1937 voyage en Italie  à prix réduit   (mortadelle succulente)

  Front populaire
 De Beauvoir
« Les rassemblements, les défilés les manifestations tout ça c’était des actions que nous approuvions mais ce n’était pas notre truc, vous comprenez, le Front Populaire était un soulèvement d’ouvriers et nous avions beau être totalement de leur côté on n’était pas des ouvriers donc si nous prenions part à leur machin c’était en qualité d’étrangers »

 1938 munichois
                1939 pro pacte germano-soviétique
              Sartre sur  Camus
« Sa jeunesse, son indépendance le rapprochait de nous. Il laissait percer de temps en temps un petit côté Rastignac, mais il semblait ne pas se prendre au sérieux. Il était simple et gai. Sa bonne humeur ne dédaignait pas les plaisanteries faciles mais il pouvait se le permettre : un charme dû à un heureux dosage de nonchalance et d’ardeur l’assurait contre la vulgarité »

« Il y a maintenant deux grands écrivains,  de Beauvoir et Camus. Camus c’est un écrivain d’Algérie, un pied noir. C’est tout le contraire de moi. Il est beau, il est élégant et c’est un rationaliste » (BHL 308)


Sartre  1946   « C‘est  un ami, un écrivain de talent, un bon styliste mais pas vraiment un génie »  Discussion Partisan review

« Une sorte d’instituteur, nul en philo mais étalant une morgue moralisatrice, une vedette (=star/petit bateau)    (Sartre= cuirassé)  Todd


                           Sartre =mépris

22  la Résistance

·         Combat
Juillet 43  « Lettre à un ami allemand »  Revue Libre

Fin 43 entre à Combat  
            témoignage Seligman : un rayon de soleil
                      Risque : amis déportés et tués ( René Leynaud)

·         La résistance de Sartre
           1940 prisonnier
                         1941 Libération 
Evasion selon Beauvoir/ faux certificat  médical ?  /intervention de Drieu la Rochelle ?/ pièce de théâtre à contenu anti-sémite appréciée par les allemands  (Bariona) ?


-          Société des gens de lettre : « prends une part active à la résistance et aux barricades de Paris »  
-          Groupe « Socialisme et liberté » : tracts, journal, renseignement, projet constitutionnel, attentat( ?)
Sarraute :  rédaction d’une constitution française
Seligman : Sartre  présenté pas Camus : qui c’est ce type ?

-          Articles dans les lettres françaises avril 43  Mars 44
-                             Appartenance au CNE 
-           Aout 44 : occupation comédie française


En même temps :

-          Publications : l’Etre et le Néant
-          Théâtre : les Mouches  Huis Clos
               Idem Camus, Mauriac, Aragon…
-          Articles dans Coemedia
                         Revue culturelle visant à démontrer que la situation en France est « normale »
             Article 1941  sur Herman Melville   
   
                       février 44  promotion des Mouches 
                       Avril 44 : hommage à Jean Giraudoux

Conclusion sur la résistance  de Sartre :  

Activités peu importantes : pas  de recensement à la BN  ni par Noguères
De Beauvoir : explication par l’hostilité des communistes et des gaullistes
Aucun écrit pétainiste ou collaborationniste mais une résistance en pointillés
                    Amateurs voire « pied nickelés »  ( ?)

Camus  se définit comme  un simple « seconde classe » de la résistance.

23 la  Libération : Combat
Rédacteur en chef de Combat
Camus Malraux
« Informer bien au lieu d’informer vite, préciser le sens de chaque nouvelle par un commentaire approprié, instaurer un journalisme critique et, en toute chose, ne pas admettre que la politique l’emporte sur la morale ni que celle-ci tombe dans le moralisme »
« Je vous ferai dire des choses emmerdantes, mais jamais dégueulasses »
·           Aron
octobre 44 - juin 47

Aron : « C’était une entreprise merveilleuse, typiquement française, à peu près folle »
      De Gaulle à Malraux « ce sont des énergumènes, mais ils sont honnêtes »
Camus/Aron
-          milieux très différents
-          goûts : fêtes/       Foot/tennis 
-          pas d’atomes crochus
-          Aron pour Camus : bourgeois, de droite, pro-capitaliste, gaulliste

-          Camus pour Aron
    Admiration pour le romancier
    Estime pour le journaliste

            Divergence sur les rapports presse/argent
                 « J’ai écrit dans des journaux vendus.  Or la vie dans les journaux vendus est tranquille et facile. L’homme d’affaires qui donne de l’argent est sensible à 2 ou 3 questions qui le touchent. On ne parle pas de ces deux questions. Pour le reste, on peut dire ce que l’on veut »

    Critique à l’égard du philosophe
A propos de l’Homme Révolté :                      
«  Les lignes maîtresses de l’argumentation se perdent dans une succession d’études mal rattachées les unes aux autres. Le style de l’écriture et le ton de moraliste ne permettent guère la rigueur philosophique. Il n’apporte rien qu’on ne peut trouver aisément ailleurs.  Camus appartient à la gauche bien- pensante »
 proposition de  retirer ces lignes dans la deuxième édition : réponse de Camus : Non
     
           sceptique  à l’égard de l’idéologue politique
-      Rapport morale/politique : pour Aron on est condamné à séparer les deux.
-          Méconnaissance de l’économie (Aron rencontre pendant la guerre  Robbins et Hayek)
L’économie de conseils ouvriers lui paraît utopique                
    -      Il le considère comme un  gentil utopiste naïf
                      «  Il fait partie des gens qui commencent les révolutions et qui les finissent sur l’échafaud »
Carlyle : «  les révolutions commencent avec des idéalistes, se font avec les fanatiques et se terminent avec les fripons »
-          Convergence : anticommunisme
« Le totalitarisme est inhérent au communisme
-           
 « Il y a plus de choses qui nous rapprochent que de choses qui nous éloignent.   Nous avons plus de raison de nous entendre que de nous quereller »  Aron


                       1 égalité   2 organisation  3 liberté
                         Sartre 2 1
                        Camus 3 1
                        Aron  3



·         Les difficultés
Marbre Combat
Conflits au sein de la rédaction sur le  référendum de 1946
Baisse du tirage
Aron «  tout le monde nous lit bien sûr, mais tout le monde c’est 40 000 personnes »
«  Les gens lisent des journaux pour se conforter dans leur opinion, non pour réfléchir »
Pia : «  Nous allons tenter de faire un journal raisonnable et comme le monde est absurde, il va échouer »
 48   abandon de Camus  rachat par Smadja  
                54   Express avec   JJSS, Mendés-France,   Mauriac 
                          Recueil des articles dans Actuelles 1 2 3
·         Point de vue sur la presse

-           « Une société qui supporte d’être distraite par une presse déshonorée et par un millier d’amuseurs cyniques court à l’esclavage malgré les protestations de ceux -là mêmes qui contribuent à sa dégradation » 
  Lazareff : « le Napoléon de la merde » 

-          Camus : « Combat fait la mauvaise conscience de quelques journalistes »


Combat continue à être la mauvaise conscience de la presse contemporaine !

 Qu’aurait dit Camus aujourd’hui ?  Presse écrite aux mains  des  Bouygues, Lagardère,  Dassault, Bolloré, Niel, Bergé, Drahi, Arnault, Pigasse…
                                                                 La télévision de « On n’est pas couché » et « bonjour les terriens » !   

24      L’épuration

·          Dès Janvier 45 il pense que l’ épuration est  manquée 
Il se retire du retrait du CNE  à  cause des  manœuvres et surenchères du PCF
Mauriac
·         Conflit avec Mauriac
Mauriac : «  je tiens mon partenaire » 
Mauriac  demande que l’épuration soit modérée par charité.   
           Camus demande la justice.

« Il n’est pas question d’épurer beaucoup mais d’épurer bien »
Il veut un juste milieu  entre le  pardon et la  rigueur communiste

-          Mauriac/Camus :

« Jeune confrère qui a des clartés sur tout,  qui m’a attaqué du haut j’imagine de son œuvre future »
1960 « Ce Sisyphe ne roulait pas son rocher .Il grimpait dessus et de là piquait une tête dans la mer »

-          Camus/ Mauriac
« L’idée que je me fais de la vulgarité, je la dois à quelque grand  bourgeois fiers de leur culture et de leurs privilèges, comme Mauriac, dès l’instant où ils donnent le spectacle de leur vanité blessée »
«Il n’est  ni juste ni charitable »

« Il a dans l’humeur une disposition invincible à se servir de la croix comme d’une arme de jet »
 « Il  a  le pardon à la bouche, la sentence au cœur »

« C’est un  journaliste de premier ordre et un écrivain du second »
                « un  Dostoievski de la Gironde » 
                                 Conclusion
Camus : « De part et d’autres des bêtises ont été dites »
« J’en suis venu à reconnaître en moi-même que M François Mauriac avait raison contre moi »

·         1945 L’affaire Brasillach

Camus signe la lettre de Marcel Aymé pour demander la grâce de Brasillach au nom de son opposition à la peine de mort.

·         1946 même action en faveur de Rebatet qui écrira, en 1960, après le Prix Nobel :

 « Camus, c’est la résurgence du pompiérisme méditerranéen le plus stérile, le plus caduc. Je  transmets un salut au jeune éditorialiste de Combat, partagé entre le désir de voir vivre ses confrères enchainés, et la nostalgie de ne pas commander le peloton de leur exécution »

Camus : « Rebatet ose parler de ma nostalgie de commander des pelotons d’exécution, alors qu’il est un de ceux dont j’ai demandé la grâce. Il a été gracié mais ne m’a pas fait grâce »

25   St Germain des près 
 Greco

·         Lecteur chez Gallimard
     
-          Admirations : Chamfort,  Proust,    Melville,   De Foe, Tolstoi,   Dostoievski Kafka

-          Admirations contemporains : Faulkner, Gide, Malraux,  Guehenno, Bernanos, Martin du Gard,

·         Critique du surréalisme                    

         Dans l’Homme Révolté, il critique Sade, Lautréamont, Rimbaud, les idoles du surréalisme.
 Pour lui,  les  Surréalistes sont une secte qui  refuse de débattre, d’argumenter,  qui  pratique  l’insulte (Anatole France ), qui est  fascinée  par l’occultisme, la  parapsychologie, l’écriture automatique, les  jeux avec le langage (ce que Camus déteste parce que, probablement la langue pour lui a été difficile à acquérir dans la quartier de Belcourt où l’on parlait le « patatouète »)  


Il critique  la phrase de Breton : « l’acte surréaliste le plus simple consiste à descendre dans la rue révolver au poing et tirer quand on peut »
                  Pour lui, le surréalisme est une révolte de papier. 
Sartre
·         l’existentialisme  
  Apparaît un  monde réduit aux Deux magots, au  Flore, à  Lipp, au Tabou :  « l’existentialisme »  se résume pour une certaine presse (Samedi soir) aux fêtes, à l’ alcool  et au « libertinage » ce qui n’est  pas totalement faux  (Cf quelques conflits d’ordre « machiste »  avec Sartre, Koestler)
   L’étiquette « existentialiste » énervait Camus : 
              « Sartre et moi nous étonnons toujours de voir nos noms associés Nous pensons même publier un jour une petite annonce où les soussignés affirmeront  n’avoir rien en commun et se refuseront à répondre des dettes qu’ils pourraient contracter respectivement »
·         l’amitié avec Sartre
 « On se voyait beaucoup moins et les dernières années chaque fois qu’on se rencontrait, il m’engueulait .Ce n’était pas encore la brouille mais c’était devenu moins plaisant. Il avait beaucoup changé. Au début, il ne savait pas qu’il était un grand écrivain, c’était un marrant et on s’amusait bien ensemble il avait un langage très vert et moi aussi d’ailleurs, on racontait un tas de cochonneries et sa femme et Simone feignaient d’être scandalisées Pendant deux ou trois ans, j’ai eu vraiment de bons rapports avec lui. On ne pouvait pas pousser très loin sur le plan intellectuel parce qu’il s’effrayait vite. En fait, il avait un petit côté voyou d’Alger, très truand, très marrant. C’est probablement le dernier qui ait été un bon ami » Sartre
             
·         Simone de Beauvoir  et Albert : des rapports exécrables
  Simone  a-t-elle été sensible au charme d’Albert ?
Elle le trouvait « Un peu canaille et fort gaulois », manquant de savoir-vivre : «  Aux portes, Il passait devant les femmes » 
    L’attirance ne  fut pas réciproque : Camus aurait dit à un ami qu’il la tenait à distance « parce qu’il craignait qu’elle ne fut trop bavarde au lit » (Lottman 593)
 Simone fut ensuite très méchante :
Elle le qualifiait « d’idéaliste, de moraliste, d’anticommuniste »
                  «  Il feuilletait les livres au lieu de les lire »
Dans  Les Mandarins (Prix Goncourt  1954)  un des  personnages est construit sur le modèle de Camus.
Perron = Camus
Dubreuilh= Sartre
Anne= Simone
Anne : « Ses livres sont mortellement classiques », «  son journal est digne d’une gazette locale »  Elle fait des allusions à son infidélité et à la tentative de suicide de Francine.


 Camus : « Il parait que j’en suis le héros (directeur d’un journal issu de la résistance) et tout le reste est faux, les pensées, les sentiments et les actes. Mieux : les actes douteux de la vie de Sartre me sont généreusement collés sur le dos » (Sartre demanda à une amie qui fréquentait beaucoup les allemands de l’aider pour faire jouer une de ses pièces)

3 Le communisme  

  A la libération, l’influence du PCF est énorme :
 Eluard, Aragon, Ponge, Merleau-Ponty, Garaudy, Kojève, Morin, Leiris, Duras,  Sarraute, Lefebvre, Vernant, Desanti, Vercors, 
Picasso, Léger,
Historiens : Besançon,  Agulhon,   Bouvier,   Furet,  Kriegel,  Leroy-Ladurie ….
1947 La Peste est une critique des totalitarismes de droite et de gauche
PCF : «  l’écrivain est froid ennuyeux »  «  les personnages  sans vie  débitent des dissertations abstraites »
            31  Camus  critique du marxisme-léninisme   
 La question de la violence révolutionnaire  
Sartre 
    justifie la peine de mort en période révolutionnaire au nom de l’efficacité.

1972 interview dans Actuel

Restez-vous un partisan de la peine de mort politique ?
« Oui,  Dans un pays révolutionnaire où la bourgeoisie aurait été chassée du pouvoir, les bourgeois qui fomenteraient un émeute ou un complot mériteraient la peine de mort. Non que j’aurai  la moindre colère contre eux. Il  est naturel que les réactionnaires agissent dans leur propre intérêt, mais un régime révolutionnaire doit se débarrasser d’un certain nombre d’individus qui le menacent et je ne vois pas d’autre moyen que la mort .On peut toujours sortir d’une prison.
Les révolutionnaires de 1793 n’ont probablement pas assez tué. »                
   « Nous ne sommes sûr de rien, mais, que la révolution soit en cours, que soient posés à Moscou,  bientôt à Cuba, les bases d’un régime qui apporte à une immense masse d’hommes une amélioration de leur sort, voilà qui n’est pas douteux, et, c’est en fonction de cette fin poursuivie, de ce sens, de cette raison, qu’il convient de juger et d’accepter la part de violence criminelle assumée par la politique stalinienne» 

A propos de la guerre d’Algérie 

« La révolution implique la violence. Conçoit-on l’indépendance de l’Algérie sans l’élimination du MNA par le FLN ? Et comment reprocher sa violence au FLN quotidiennement confronté pendant des années à la répression de l’armée française à ses torture et à ses massacres Il est inévitable que le parti révolutionnaire en vienne à frapper aussi également certains de ses membres. »

 A propos de la décolonisation préface  aux damnés de la terre de Franz Fanon
« Dans le premier temps de la révolte,  abattre un européen, c’est faire d’une pierre deux coups : supprimer en même temps un oppresseur et un opprimé : restent un homme mort et un homme libre »
Camus
«  Sans doute, la révolution est-elle possible. Peut- être une société sans classe, donc heureuse, finira –t-elle un jour par apparaître,  mais je n’en suis pas sûr. Je ne suis pas sûr du moment où cela adviendra, en sorte que, dans le doute, je me refuse à accepter les gigantesques sacrifices que, au nom de cette simple perspective, vous prétendez nous imposer »  

« Il me parait incontestable que nous vivons dans le mode de la terreur dans la mesure où un homme croit au progrès inévitable, dans la mesure où un homme croit à une logique historique inévitable. Nous nous basons sur le rationalisme, nous admettons le principe que la fin justifie les moyens..»


   32  Camus critique de l’URSS

Staline
·         Sartre
-          Sartre a été l’objet de critiques violentes du PCF   (   Kanapa,  Garaudy )
L’existentialisme  a été qualifié de  « système philosophique de la bourgeoisie décadente qui se refuse à rallier les positions du prolétariat »
1948   : Faiedeiev  le traite de «   Hyène dactylographe » 
      Et pourtant il sera proche compagnon de route en  52-56 
-          Le marxisme est l’horizon indépassable de notre époque    
-           En URSS, la liberté des écrivains est totale   
-          Il critique la publication du   rapport Krouchtchev  ( il  ne  faut pas désespérer Billancourt !)

Pourquoi ?
-          URSS= progrès : propriété collective / élimination de la bourgeoisie
-           Espoir d’une démocratisation du communisme
-                         Il continuera son compagnonnage avec les partis communistes  même s’il   soutient les   insurgés hongrois en 1956, des dissidents soviétiques ( Siniavski, Daniel , Soljénitsyne qui refusera de le rencontrer) : visites fréquents dans les pays communistes jusqu’au milieu  des années 60.

·         Camus 

Il considère que l’URSS est un  socialisme « césarien  et militaire »
          Il ne supporte pas les « manifestations de patronage », « e catéchisme de la propagande », la  vie grise
           URSS : « Terre d’esclaves balisée de miradors »
Il soutiendra un des premiers dissidents polonais,  Milosz  au début des années 50.
Il soutient  les révoltes des  ouvriers dans les pays communistes : 

1953  Berlin                                         
1956 Pologne  Hongrie

   Tous les dissidents lui rendront hommage : Pasternak, Soljenitsyne, Havel, Michnik

                              Plioutch « pour moi et pour beaucoup de dissidents, Camus a une pensée tragique mais courageuse. Camus, c’est la vérité,  Sartre, c’est la falsification »


Beauvoir   signale une conversation entre Sartre et Camus en 48
Camus
« Avez-vous réfléchi à ce qui vous arrivera quand les russes seront là ? » demanda-t-il à Sartre.
Il ajouta d’une voix passionnée : « ne restez pas »
-          et vous, vous comptez partir ? dit Sartre
-          moi, je ferai ce que j’ai fait pendant l’occupation allemande. 
  Sartre objecta qu’il n’accepterait jamais de lutter contre le prolétariat.
      Il ne faut pas que ce soit une mystique, dit vivement Camus, partez. Si vous restez, ils ne vous prendront pas seulement la vie mais aussi l’honneur. Vous mourrez en déportation. Ils vous feront prêcher la soumission, la trahison, et on les croira. 
(Camus connaissait le sort réservé aux intellectuels non-communistes dans les pays de l’Est)

 Simone de Beauvoir écrit  :
   « Je fus secouée, et, les jours suivants, je repris à mon compte les arguments de Camus »

33 Parution de «  L’homme révolté »  1951  

Sartre Camus

Sartre Camus : disputes, décembre 46, mars 47  à propos de Merleau –Ponty


·         Critiques de  Francis  Jeanson  en « service commandé »   (Comme le maffioso =   aucun contact  préalable avec  la ‘cible’ du contrat !)

 «C’est un grand livre raté »
        
 Sartre                  
« Mais, Camus je n’ai jamais été contre lui. J’ai été contre le papier qu’il a envoyé aux Temps Modernes, en m’appelant M Le Directeur, et   en développant des idées insensées. » 
  « Vous n’êtes pas à droite, Camus, vous êtes en l’air »
« Arrêtez de monter sur votre « piédestal portatif »
 « Et si votre livre témoignait simplement de votre incompétence philosophique ? S’il n’était fait  que de connaissances ramassées à la hâte et de seconde main ? »
«  Je n’ose  vous proposer de vous reporter à l’Etre et le Néant, la lecture vous en paraitra inutilement ardue »
« M Camus met quelque coquetteries à citer des textes de Jasper, de Heidegger, de Kierkegaard qu’il ne semble pas toujours bien comprendre »
« Hegel et moi,  nous avons au moins quelque chose en commun, c’est que vous ne nous avez pas lu »
     Jeanson : « Esthète, belle âme, amateur moraliste,  défenseur d’une  vague morale de Croix Rouge  cf (La Peste)… qui reçoit, en plus,  les éloges de la droite »  
      Camus :   « Si la vérité me paraissait à droite, j’y serais »
 Camus exempt du syndrome « D’où tu parles ? »
Un fait est rejeté par la gauche parce qu’il est affirmé par la droite : ex Katyn

·         En 1970  paraît le  pamphlet de Jean-Jacques Brochier  « Camus, philosophe pour classes terminales » qui résume la critique sartrienne :
« Plagiaire… dissertations d’un élève moyennement doué… auxiliaire des pouvoirs en place…pétainiste… homme de droite… suppôt du colonialisme,…confond communisme et stalinisme… prophète… moraliste… pas de sens politique…  soutien de l’Algérie française …antisémite …..Il ne s’est pas tu sur la guerre d’Algérie il a pris parti pour la guerre….Relations avec la politique longues et malheureuses…. position réactionnaire… non-violence masturbatoire  …. Il ne gêne plus personne … sa fonction est d’endormir ….  on rira de la Peste…. information hâtive ou inexistante… idéalisme au ventre mou…  salade métaphysico-littéraire… il déteste finalement la pensée comme lui reprochait Sartre… le vrai maître de Camus, c’est Joseph de Maistre,
Moraliste qui ne brille  pas par une intelligence radieuse ….. raconteur d’histoire et non penseur… révolte de bazar….  défroque ridicule du professeur de morale  qui du haut de Sirius juge notre petit monde… un petit bourgeois assez peu intelligent et assez peu cultivé…  ce professeur de morale n’était qu’un surveillant de la morale d’autrui,…vétilleux… tatillon, même pas un sémaphore…   il faut le   reléguer aux accessoires…. pantin moraliste ….. »

Maria Casares : « il se promène dans la maison comme un taureau blessé »

 « Je commence à être fatigué de recevoir des leçons d’efficacité de la part de censeurs qui n’ont jamais placé que leurs fauteuils dans le sens de l’histoire » (allusion à l’occupation de la comédie français  par Sartre endormi dans un fauteuil)
 « Quelque chose en eux aspire à la servitude. Ils ont rêvé d’y aller par quelque noble chemin plein de pensées. Mais il n’y pas de voie royale vers la servitude. Il y a la tricherie, l’insulte, la dénonciation du frère. Après quoi, l’air des trente deniers. »
             « La seule industrie qui ne connaisse pas le sous-emploi est la méchanceté »

 Il a le sentiment d’être seul  (témoignage de sa fille)
Heureusement, les sartriens ne connaissaient pas  l’« Impromptu des philosophes », texte  publié à titre posthume, où il se moque, en imitant Molière, de Monsieur « Néant »
1957 « Il y  at-il dans votre œuvre un thème selon vous important que vous estimez négligé par vos commentateurs : l’humour »
« Toute mon œuvre est ironique »


4         La guerre d’Algérie

42  L’indépendance de l’Algérie  

1939 misère de la Kabylie : chômage, faim, épidémies, analphabétisme
                                                 Incompétence autorités
                                                Mesures  sociales
 Attitude / nationalistes : « la seule façon d’enrayer le nationalisme algérien, c’est de supprimer l’injustice dont il est né »

·         Sartre : pour l’indépendance

-          libération des peuples colonisés
-          soutien au FLN
        « La victoire du FLN sera la victoire de la gauche »

-           Soutien au manifeste des 121 (appel à la désertion)
-          soutien aux porteurs de valises (réseau Jeanson)

·         Aron : pour l’indépendance
 Juin  1957 la tragédie algérienne
« Mieux vaudrait encore la solution héroïque de l’abandon et du rapatriement qu’une guerre menée à contre-cœur et sans chance de succès »
-          Décolonisation=mouvement  irrésistible
-          Mauvaise affaire pour la France
-          Nécessité d’un plan pour la réinsertion des européens en France
-          Impossibilité de l’  intégration  défendue par Soustelle

-          De Gaulle

            « Le taux de croissance démographique est trop différent pour que ces peuples de races et de religion autres puisent être une fraction d’une même communauté »
                         Colombey les deux mosquées
                        Européen/arabes =huile /vinaigre
                « Ceux qui croient à l’intégration ont des cervelles de colibri »

Louis Terrenoire juin 57 : « M Aron rappelle irrésistiblement l’homme Pierre Laval qui pensait que les jeux étaient fait en juin 40 »


·         Camus : contre l’indépendance

-          Pourquoi ?

« Le temps des colonialismes est fini »  préface Actuelles 3       

  Il se sent algérien. Il se considère comme « en exil » en France.  

« 80 % des français d’Algérie ne sont pas des colons, mais des salariés et des commerçants »

« Une grande réparation doit être faite au peuple arabe. Mais par la France toute entière et non avec le sang des français »

 « Si bien disposé qu’on soit avec la revendication arabe, on doit cependant reconnaitre qu’en ce qui concerne l’Algérie,  l’indépendance nationale est une formule passionnelle. Il n’y a jamais eu encore de nation algérienne. Les juifs, les turcs, les italiens, les berbères auraient autant de droit à la direction de cette nation virtuelle. Actuellement, les arabes ne forment pas à eux seuls toute l’Algérie. Les français d’Algérie sont eux aussi, au sens fort du terme, des indigènes «  

  Il considère que les es  chefs militaires du FLN sont  fanatiques, extrémiste, rétrogrades.  Le FLN est, pour lui,  sur une ligne panislamiste manipulée par l’Egypte et l’URSS.    

                   Déclaration du FLN le 1 11 1954 : «Notre  lutte s’inscrit  dans le cadre des principes islamiques »
 « L’indépendance de l’Algérie dirigée par les chefs militaires les plus implacables de l’insurrection entrainera  l’éviction de millions de français avec le risque que cette humiliation comporte »

-           propositions
« Une Algérie constituée par des peuplements fédérés et reliée à la France me paraît préférable sans comparaison possible au regard de la simple justice, à une Algérie reliée à un empire d’islam qui ne réaliserait à l’intention des peuples arabes qu’une addition de misères et de souffrance et qui arracherait le peuple français d’Algérie à sa patrie naturelle »                 Actuelles III

          Fédéralisme
-          Assemblée fédérale
-          Deux sections : une métropolitaine (élus métropolitains + outre-mer) /une autre avec des musulmans de statut coranique qui débattrait des questions propres aux musulmans  -Assemblée fédérale = pbs communs :     défense diplomatie
-          Lois différentes  avec  deux catégories de citoyens égales mais distinctes (Actuelles III)
-          Confédération laïque de populations multiples (à la libanaise ?)

-          Critiques
                    Memmi : « Camus est un  colonisateur de bonne volonté »
                    Jean Sénac  pro FLN assassiné après l’indépendance =  « algérien de la côte »


          Sous- évaluation des effets du colonialisme sur les populations arabes  et des promesses non-tenues de la France

41  Appel à la trêve civile : la question du terrorisme


             Réunion le 22/ 01/ 56   Alger
   Un millier de personnes, un millier dehors : « Camus au poteau »


« Plus de doutes que de certitudes », « préparer un climat plus favorable à une discussion enfin raisonnable »
 A propos du terrorisme :
Il critique les 2 terreurs : celle  du tortionnaire et celle du poseur de bombe FLN : « aucune cause ne justifie la mort de l’innocent »


Sartre : « Camus , vous vous prenez pour la morale ! »
                             « morale c’est peau de balle » Nizan
 Beauvoir écrit à propos de la proposition de Camus de trêve  civile : « Jamais Camus ne prononça de paroles plus creuses que lorsqu’il demandait pitié pour les civils. Nous refusions de nous indigner contre les méthodes de lutte du FLN. On ne fait pas la guerre avec des enfants de chœur »
    « C’est une nécessité historique à laquelle nous ne pouvons rien »

Camus

Préoccupation  permanente

 Cf Les justes

« Le terrorisme algérien est une erreur sanglante, à la fois en lui-même et dans ses conséquences : il est l’expression de la haine, il  est porteur de racisme, il a pour effet de mettre les libéraux dans une position intenable, il affole les français et les pousse vers les ultras.  Les attentats ont interdit toute possibilité d’une Algérie plurielle, multiethnique.  Quelle que soit la cause que l'on défend, elle restera toujours déshonorée par le massacre aveugle d’une foule innocente où le tueur sait d’avance qu’il atteindra le femme et l’enfant »

                   
Discours Nobel 1957 :

 « J’ai été et je suis toujours partisan d’une Algérie juste où les deux populations doivent vivre en paix et dans l’égalité. J’ai toujours condamné le terreur.  Je dois condamner aussi un terrorisme , qui s’exerce aveuglément dans les rues d’Alger, par exemple, et qui peut frapper ma mère ou ma famille. Je crois à la justice , mais je défendrai ma mère avant la justice »

Beuve- Méry : « J’étais sûr qu’il allait dire une connerie »
Interprétation : Si ma mère meurt dans un attentat considéré comme un acte de justice  alors je préfère ma mère à ‘cette’ justice.


43  Découragement
Interventions sur 150 cas en faveur de condamnés du FLN 
1958  Il dénonce « le terrorisme appliqué aux civils français comme d’ailleurs et dans une proportion plus grande aux civils arabes »
« Vous me croirez sans peine que j’ai mal à l’Algérie comme d’autres ont mal au poumon »  1955 
     « Dans l’impossibilité de me joindre à aucun des camps extrêmes , devant la disparition progressive de ce troisième camp où l’on pouvait garder la tête froide doutant aussi de mes certitude et de mes connaissances, persuadé que la véritable cause de nos folie réside dans les mœurs et le fonctionnement de notre société intellectuelle et politique, j’ai décidé de ne plus participer aux incessantes polémiques qui n’ont eu d’autre effet que de durcir en Algérie les intransigeances aux prises et de diviser un peu plus un France déjà empoisonnés par les haines et les sectes »
Lettre à Jean Grenier  « je crois comme vous qu’il est trop tard pour l’Algérie. Je ne l’écris pas dans mon livre parce qu’on n’écrit pas que tout est fichu »
Débats
Edward Saïd : Albert Camus ou l’inconscient colonial 2000

2010  caravane Camus en Algérie
 texte « alerte aux consciences anticolonialistes »            Camus présenté comme  militant de l’Algérie française  et écrivain colonial
Défense Yasmina Khadra,   Kamel Daoud

2013  expo Camus  Benjamin Stora  Michel Onfray  démissionnaires

5         Prix Nobel 1957

Camus   
Prudhomme, Rolland, France, Bergson, Martin du Gard, Gide, Mauriac
                                         Hommage à Malraux
Kleber Haedens
 «Le terme  ‘Ecrivain classique’ s’applique aux momies »
« Sa pensée met l’illusion de la profondeur à la portée des intelligences les moins privilégiées »
Félicitations de : Faulkner Soljenitsyne Milosz, Paz, Gordimer, Kertesz, Llosa, Styron, Arendt
Gendarme «  roman à l’eau de rose ou roman  policier ? »
Camus : « moitié-moitié » 

Conclusion : La revanche
  Sartre : «  Il représentait, en ce siècle et contre l’histoire, l’héritier actuel de cette longue lignée de moralistes dont les œuvre constituent, peut- être, ce qu’il y a de plus original dans les lettres françaises. Son humanisme têtu étroit  pur austère et sensuel livrait un combat douteux contre les évènements massifs et difformes de ce temps Mais, inversement, par l’opiniâtreté de ses refus il réaffirmait au coeur de notre époque contre les machiavéliens contre les veaux d’or du réalisme l’existence du fait moral »

 BHL  Le siècle de Sartre  p418  Nous sommes nombreux à entendre ce message du dernier Sartre : « réparation à Camus. Il valait mieux décidément avoir raison avec Camus que tort avec moi » 
BHL ou Sartre ?
·         Funambule  Casares :  maladie / écriture / l’action
«  Chaque génération, sans doute, se croit vouée à refaire le monde. La mienne sait pourtant qu’elle ne le refera pas. Mais sa tâche est plus grande. Elle consiste à empêcher que le monde se défasse. »
« Mon rôle n’est pas de transformer le monde ni l’homme mais il est peut- être de servir à ma place les quelques valeurs sans lesquelles un monde même transformé ne vaut la peine d’être vécu »
On dit de quelqu’un décédé jeune : c’est une perte irréparable. En ce qui concerne Camus la formule n’est pas de la simple rhétorique  
           On a lu  Camus en son temps, on le lit aujourd’hui, on le lira demain.
Bibliographie

Camus Herbert Lottman 2013
Camus Olivier Todd
L’ordre libertaire Michel Onfray 2011
Dictionnaire Camus Jeanyves Guérin 2010
Albert Camus soleil et ombre Roger Grenier

DVD
Albert Camus journaliste   Joel Calmettes
Albert Camus  Jean Daniel Joel Calmettes






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